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L’ex-président de la Cité de l'architecture et du patrimoine1, aujourd’hui maire de Versailles2, François de Mazières, explique sa vision du paysage en ville à la veille d’un été particulier, entre respect des mesures sanitaires et liberté retrouvée.
Il y a eu plusieurs périodes. Lors de la première phase, celle du confinement très strict, nos personnels ont été consignés chez eux et tous les espaces verts fermés3. A partir du 11 mai, les chantiers d’aménagement du paysage ont pu reprendre, quant aux espaces verts, ils ont rouvert progressivement (le parc et le château le 6 juin). Du point de vue des maires, le confinement a globalement été intense car nous avons été très sollicités sur tous les fronts. Au final, il aura été certes une épreuve mais également un épisode fédérateur et mobilisateur pour les équipes, à la fois aux services de la ville et à l’hôpital.
On a constaté une augmentation de la fréquentation des lieux publics et de nos forêts. Le bassin de la pièce d’eau des Suisses du château est, par exemple, devenu un véritable lieu de rencontre pour plusieurs milliers de jeunes de Versailles et des environs.
Cela nous pose d’ailleurs problème au regard des mesures sanitaires et sécuritaires. Le danger, c’est, en effet, le basculement vers l’absence totale de précaution, alors que la menace est toujours présente. Ce n’est pas raisonnable !
Les adultes démontrent à cet égard plus de sérieux que les plus jeunes qui ne respectent pas ou peu les gestes barrières. Dans une entreprise, un commerce ou un moyen de transport, les salariés, les clients, les usagers évoluent dans un cadre codé. Dans un environnement plus ouvert, comme une brasserie ou un espace vert, ce n’est pas le cas. Le comportement d’une même personne peut finalement beaucoup varier en fonction du contexte et du lieu !
Le confort des habitants passe forcément par la nature en ville, une indispensable source de santé et de calme. Cette crise du Covid-19 a montré qu’il fallait verdir encore davantage les villes. Quand j’étais président de la Cité de l’architecture et du patrimoine, la préoccupation environnementale était déjà au premier plan de ma politique. C’est elle qui a notamment motivé l’exposition « La ville fertile » en 2011, une véritable immersion dans le monde végétal et urbain, dont le commissariat était assuré par l’architecte - paysagiste, Nicolas Gilsoul, et les paysagistes, Michel Péna et Michel Audouy. À l’époque, nous étions avant-gardistes car le rapport entre les paysagistes et les architectes pouvait être compliqué. Depuis, en étant maire, j’ai pu mettre la théorie en pratique !
Au XXe siècle, les quartiers ont été fermés. Mon objectif en tant que maire de Versailles et président de la communauté d'agglomération Versailles Grand Parc est de réfléchir à la perméabilité des espaces, des squares et avenues et cela en ayant une vision du Grand Paris et de l’ensemble de l’Île-de-France. Il faut que la nature soit présente partout, de façon diffuse.
Je suis dans cette mesure très marqué par le livre fondateur de Jean Claude Nicolas Forestier, Grandes villes et systèmes de parcs (1908). Ce collaborateur d’Alphand, qui a développé l’organisation des jardins à Paris à l’époque du Baron Haussmann, s’est posée la question à l’échelle de la capitale : comment créer une articulation entre la périphérie de la ville, avec les grands parcs de Boulogne et de Vincennes, et l’intérieur de la ville, avec les petits squares ? C’est cette théorie de gradation de l’ampleur des espaces verts qui permet la satisfaction des besoins de nature immédiats. Cet ouvrage du début du siècle dernier est toujours d’actualité…
Il est essentiel de penser à la gestion du temps long et non du temps immédiat. Prenez les arbres : on a toujours envie d’arbres matures pour l’inauguration d’un nouveau quartier, mais il faut veiller à ne pas choisir des arbres trop grands pour garantir une bonne pousse…
L’autre condition est d’être bien entouré. À Versailles, j’ai créé un poste de paysagiste conseil, confié à Nicolas Gilsoul. Il intervient en cas de besoin pour nous aider, en complément de nos 85 agents animés par notre remarquable directrice des espaces verts, Cathy Biass-Morin. Les villes moyennes gagneraient à avoir une structure similaire, une aide experte.
Pour en savoir plus sur la politique de végétalisation de Versailles, lire l'interview de Cathy Biass-Morin, directrice des espaces verts de Versailles.
1 De 2004 à 2012.
2 M. de Mazières a été réélu pour un troisième mandat en mars 2020.
3 La Ville gère 86,5 ha composés de : 12,5 ha de squares, jardins et parcs ; 34 ha d'espaces verts ponctuant la voirie : massifs, plates-bandes, terre-pleins ; 20,5 ha de parcs forestiers et 18,5 ha répartis sur les 4 cimetières.
photo portrait François de Mazières : © Ville de Versailles.
La récente crise du Covid-19 comme l’enchaînement de variations climatiques importantes ces dernières années ont souligné l’importance du végétal en milieu urbain. Malgré un contexte fortement perturbé pour les collectivités, il s’avère primordial de répondre au besoin de nature très fort des citoyens, en relançant notamment les aménagements paysagers.
Cathy Biass-Morin, Directrice des espaces verts de Versailles, Vice-présidente de l’Association des Ingénieurs Territoriaux de France (AITF), évoque les nombreux bénéfices de l’entretien naturel des cimetières de la ville, alors que la ville n’utilise plus de produits phytosanitaires depuis quatorze ans.