Répondre aux besoins des professionnels du paysage et des collectivités avec la sélection variétale

Enquête - Le 04 janvier 2022



Calycanthus floridus. © VALHOR.

La sélection des plantes trouve son origine au Néolithique, fruit d’une volonté de l’homme de reproduire des espèces en fonction de leurs performances. Devenue une activité à part entière au XIXe siècle, la sélection variétale s’est professionnalisée, accélérant ainsi l’évolution du progrès technique et scientifique. Héritières de ce savoir-faire, les entreprises semencières mais aussi les pépiniéristes, horticulteurs ou producteurs de gazons innovent constamment pour proposer des variétés adaptées aux attentes de leurs clients et des collectivités. Éclairage.

La sélection variétale joue un rôle fondamental en adaptant les caractéristiques de la plante à un environnement (qualité, sol, météo régionale). La biodiversité végétale, ancienne et actuelle, constitue la boîte à outils du sélectionneur et un levier de solutions pour proposer au marché des réponses appropriées en fonction de multiples contraintes telles que les évènements climatiques extrêmes, les nouveaux ravageurs ou les maladies. « Si auparavant on utilisait la sélection pour améliorer les rendements puis pour le goût et la conservation, aujourd’hui ce sont ses qualités techniques et environnementales qui prévalent dans un contexte de moindres ressources et d’arrêt progressif des traitements phytosanitaires », explique Rachel Blumel, Directrice générale de l’Union française des semenciers (UFS).
« C’est un métier complexe de très longue haleine », détaille Éric Renault, dirigeant des pépinières éponymes (lire son interview). Il faut jusqu’à 15 ans de recherches en moyenne pour établir une nouvelle variété de gazon ou de rosier : observation en situation, tests, premiers choix, tests GEVES* selon différents critères dits « DHS » (variété distincte, homogène et stable) et « VATE » (valeur agronomique technologique et environnementale), autorisation ministérielle pour inscrire la nouvelle variété au répertoire, production selon les saisons… Plus de 250 variétés de gazons sont ainsi répertoriées au catalogue officiel sans compter les taxons ou les espèces fourragères qui peuvent être utilisés en complément**.
Le secteur consacre 13 % de son chiffre d’affaires à la R&D, un pourcentage peu ou prou équivalent aux investissements de l’aéronautique ou de la pharmacie (en recherche fondamentale et recherche appliquée) ! « On compte actuellement 244 sites de production de semences en France avec 74 centres de recherche privés qui couvrent 90 % des départements, un élément important pour le développement local des variétés », poursuit Rachel Blumel.
La recherche génétique est un des maillons de la chaîne : elle intègre les remontées du marché par les professionnels du paysage auprès des producteurs puis des sélectionneurs. Même si une nouvelle variété se distingue de l’existant, ce n’est pas de l’innovation de rupture. D’où l’importance, mais aussi la difficulté, d’avoir une vision prospective à 20-30 ans dans le cadre d’un dérèglement climatique qui s’accentue, d’autant qu’il faut désormais prouver l’utilité et l’intérêt d’une variété en termes de résistance, durabilité, tolérance et ce quel que soit son usage : parcs et jardins, surfaces urbaines, terrains de sport, toitures végétalisées... Sans réel progrès génétique, la variété est abandonnée. « La complexité du sujet renforce l’importance d’une approche collective et interprofessionnelle qui comprend un important travail de pédagogie et un lien plus fort entre les différents métiers concernés », complète Rachel Blumel.
Dans cette optique, les « plantes de service » peuvent être des alliés précieux. Celles-ci regroupent des espèces végétales cultivées en association avec une culture principale et susceptibles de rendre différents services à vocation écosystémique. À titre d’exemple, capter l’azote du sol et le restituer à la culture, lutter contre les bio-agresseurs ou les adventices, favoriser l’action des auxiliaires tels que les pollinisateurs ou la faune, ou encore combattre l’érosion des sols et préserver ses fertilités physique, chimique et biologique. Autant de rouages aptes à répondre aux problématiques urbaines mais pas seulement. « N’oublions pas que les gazons sont un élément de captation du carbone », conclut Jean-Marc Lecourt, directeur adjoint DFL Seeds & Science (lire son interview).

* Groupe d'étude et de contrôle des variétés et des semences.
** www.choixdugazon.org