Le végétal au cœur de la redynamisation des centres-villes

Enquête - Le 15 octobre 2020



La place de la Brèche à Niort redynamise le centre-ville. © Niort / Victoires du Paysage 2014.


Dans le contexte d’une coopération renforcée entre la ville et la nature, les différents dispositifs de financement publics, comme ceux pilotés par l’Agence pour la rénovation urbaine, les contrats de développement territoriaux ou encore le programme « Action cœur de ville » entendent répondre aux défis environnementaux de demain et favoriser l’amélioration du cadre de vie, la cohésion sociale et l’autonomie des territoires. Décryptage.

Les villes se sont longtemps construites en opposition à la nature, misant sur les solutions techniques pour relever les défis de l’urbanisation grandissante. Pourtant, les défis auxquels elles sont confrontées aujourd’hui comme le manque de ressources en eau ou la surchauffe urbaine les conduisent à envisager de nouvelles solutions, comme celles apportées par le végétal. L’initiative « Action Cœur de Ville », notamment, se penche sur les moyens de favoriser l’attractivité et le dynamisme des villes moyennes et initie un grand nombre de projets de revalorisation en milieu urbain où le végétal a droit de cité.  

Un programme au service d’une meilleure cohésion urbaine

Lancé en 2018 par le ministre de la Cohésion des territoires, « Action Cœur de ville » est un plan global fondé sur cinq grands axes : réhabilitation/restructuration de l’habitat en centre-ville, développement économique et commercial, accessibilité/mobilités et connexions, mise en valeur de l’espace public et du patrimoine, accès aux équipements et services publics. Au total, ce sont 222 communes de 8 000 à 140 000 habitants qui sont concernées par ce plan de revalorisation et d’investissement disposant d’une enveloppe budgétaire de 5 milliards d’euros. « Action Cœur de Ville » rend manifeste l’intérêt grandissant des territorialités et des politiques pour la nature en tant que vecteur d’attractivité. Il souligne la prise de conscience à l’échelle nationale de l’importance des centres des villes moyennes.

À Troyes, une requalification exemplaire du centre ancien

Chef-lieu de l’Aube, la ville champenoise est dotée d’une riche histoire dont elle garde la trace (rues étroites, habitat resserré). L’enjeu a été, entre autres, d’insérer du végétal dans un environnement essentiellement minéral, a priori peu propice à son développement. La municipalité a travaillé à la revalorisation de son centre ancien, animée par la volonté de construire un paysage urbain cohérent à l’échelle de la ville et de l’agglomération : « Nous fonctionnons en partenariat avec de nombreux programmes transversaux sur nos différents projets ce qui en augmente l’ambition et la portée », explique Isabelle Héliot-Couronne, adjointe au maire chargée des finances et référente du programme « Action Cœur de ville ». Pour la municipalité, ce programme spécifique représente un levier financier conséquent, non pas tant pour lancer de nouvelles réalisations que pour concrétiser celles qui n’avaient pas encore été mises en œuvre par manque de moyens. C’est ainsi que, dès réception des fonds, Troyes a pu mener à terme rapidement une série de projets. « "Action Cœur de ville" enrichit les actions portées par la ville et démontre que l’attractivité est la somme d’éléments convergents travaillés en cohérence, dont la nature est partie prenante », conclut l’adjointe au maire. Ainsi, grâce à cette aide nationale, un ensemble de balades et de parcs ont pu être aménagés sur des délaissés urbains, des réhabilitations très remarquées comme celles de l’écoquartier de Tauxelles et le projet d’aménagement des berges de Seine ou encore, à moindre échelle,Le parc Vassaules. © Carole Bell - Ville de Troyes la mise en place de jardins éphémères dans le centre ancien, de plantations au pied des façades avec l’accord des riverains et d’espaces verts autour des monuments historiques. Le parc des Moulins fait aussi la fierté de la ville avec ses quelques 20 hectares et constitue un véritable poumon de verdure en bordure du centre-ville. Autrefois totalement laissé à l’abandon, c’est aujourd’hui un espace attractif qui permet de revaloriser à son tour les quartiers situés dans sa proximité immédiate ainsi que les autres espaces verts à moindre échelle comme les jardins ouvriers ou familiaux.

Le parc Vassaules. © Carole Bell - Ville de Troyes.

Amiens, pour une nouvelle continuité urbaine du quartier nord avec le centre-ville

Après une première phase de rénovation urbaine subventionnée par l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) et conduite par l’équipe formée de François Grether et Jacqueline Osty, lauréate du Grand Prix de l’urbanisme en 2020, la réhabilitation du quartier nord d’Amiens se poursuit depuis 2016 avec la seconde phase du « Grand Projet de Paysage ». L’objectif ? Placer les enjeux climatiques et biologiques au centre de la démarche de renouvellement de l’espace public.
« Le but de ce Grand Projet de Paysage était de remettre de la lisibilité, du confort et de pacifier cet espace public, très tendu, par le paysage et non par l’architecture ou l’ordonnancement urbain », explique Antoine Petitjean, architecte-urbaniste en charge du projet. En effet, au fil du temps le quartier nord de la ville, une addition de grands ensembles érigés à partir de la fin des années 1950, s’est refermé sur lui-même, cloisonnant ainsi les espaces en raison des incivilités, des conflits et des mésusages. L’enjeu était alors de mettre en place les grandes continuités de paysage qui manquaient à cet espace et pouvaient apporter une réponse aux problématiques climatiques et urbaines : îlots de chaleur, équipements sous-exploités, espaces publics biologiquement appauvris, espaces de stationnement prenant le pas sur les autres usages. « Le grand effort de ce plan de paysage a été de fracturer toutes ces poches, devenues étanches les unes aux autres, par un équipement qui est une grande figure de paysage, régulatrice du point de vue climatique », poursuit Antoine Petitjean.
Concrètement, les parkings de surface, sous-utilisés en raison du faible taux de motorisation dans ce quartier, sont progressivement supprimés, reconvertis et végétalisés pour les rendre perméables et favoriser l’accès à des espaces de nature en ville. Un éventail de solutions a été mis en place dont la fracturation des revêtements goudronnés, suivie d’un décompactage et d’un ensemencement des sols. © Wagon Landscaping – Yann MonelCes opérations simples et peu coûteuses permettent à l’eau de pluie de s’infiltrer à nouveau naturellement et à une nouvelle biodiversité de se développer, donnant ainsi naissance à des espaces verts en mouvement pour lesquels il est possible d’imaginer de multiples usages. Ce projet de réaménagement urbain, à horizon 2050, a aussi une forte portée sociale dans un quartier dégradé : ils font évoluer le regard des habitants sur leur propre espace de vie, diversifient les usages et améliorent les conditions de vie.
© Wagon Landscaping – Yann Monel


Mobiliser des ressources et des moyens et proposer des économies sur des postes inédits grâce à l’intervention paysagère constituent indéniablement des pistes sur lesquelles les villes peuvent miser pour accélérer la transformation des territoires et devenir plus attractives.

À Troyes, une requalification exemplaire

À Troyes, une requalification exemplaire

Isabelle Héliot-Couronne, adjointe au maire de Troyes et référente du programme « Action Cœur de ville »

Point de vue - Le 15 octobre 2020

Adjointe au maire de Troyes, Isabelle Héliot-Couronne est aussi responsable de la Commission développement économique à la Région Grand Est. En charge des Finances, elle est la référente du programme « Action Cœur de ville ». Elle nous illustre ici les actions phares engagées autour du végétal.

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