L’immobilier passe au vert

Enquête - Le 17 octobre 2019



Ecoquartier Arago à Pessac. © VALHOR / Les Victoires du Paysage / Debarre Duplantiers Associés.

En décembre dernier, le Salon de l’immobilier d’entreprise (SIMI) a été l’occasion pour VAL’HOR et le Cibi de lancer un appel à la mobilisation en faveur de l’infrastructure verte. Un appel d’ores et déjà entendu par de nombreux promoteurs, aménageurs et constructeurs, qui végétalisent progressivement leurs projets de logements, bureaux, commerces ou restaurants… jouant ainsi un rôle clé dans la naturalisation des villes.

Comme l’a souligné Daniel Breuiller, vice-président de la Métropole du Grand Paris, lors d’une conférence organisée en février 2019 par la Société de Conception d’Architecture et d’Urbanisme, « La métropole de demain sera verte ou sera invivable ». Les acteurs de l’immobilier en ont conscience  et avec l’aide des professionnels du paysage, ils  intègrent de plus en plus le végétal à leurs projets. Toits végétalisés, jardins suspendus, cours intérieures… Cette intégration prend des formes diverses et parfois exemplaires, comme en témoigne l’éco-campus d’Orange à Châtillon (92) livré par Nexity Interconstruction, primé lors des Victoires du Paysage 2018. Dès sa conception, le programme prévoyait d’aménager des espaces extérieurs autour du futur centre de recherche de l’entreprise. Aujourd’hui, les bâtiments sont nichés au milieu d’un parc d’un hectare entourant un grand lac, lieu de vie et de passage au cœur de la nature à quelques encablures seulement de la capitale.


Ecocampus Orange à Châtillon. © VALHOR / Les Victoires du Paysage / F. Mercier Paysagiste.

Des enjeux de taille

Le verdissement des programmes immobiliers répond à une demande forte de la population : selon l’enquête Unep-Ifop « Ville en vert, ville en vie » de 2016, pour plus de huit Français sur dix, la proximité d’un espace vert est un critère important dans le choix d’un logement.  Mais ce n’est pas son seul intérêt, loin s’en faut. À une époque d’urgence climatique et écologique, le végétal répond à des enjeux environnementaux cruciaux : il limite l’érosion de la biodiversité, améliore la qualité de l’air, contribue au rafraîchissement des températures et à une gestion durable des eaux pluviales. En reconnectant les citadins à la nature, les infrastructures et aménagements verts ont aussi des effets positifs sur les individus et la collectivité. Diminution du stress et de l’angoisse, incitation à se déplacer à pied ou en vélo, renforcement de l’attachement aux lieux, multiplication des opportunités de contacts et d’échanges… les études1 démontrent leurs  nombreux bienfaits sur la santé, le bien-être, la qualité de vie et le tissu social.

Vers un nouveau modèle économique

La végétalisation est donc indiscutablement une démarche fructueuse pour les promoteurs, aménageurs et constructeurs, qui voient s’accroître la valeur de leurs biens. Le coût d’investissement doit bien sûr être pris en compte, en intégrant le plus en tôt possible l’intervention d’un paysagiste concepteur et le choix d’une entreprise du paysage. Le coût d’entretien lors de la phase exploitation doit lui aussi être anticipé très en amont pour assurer la pérennité des ouvrages végétalisés. Il s’agit en outre d’accompagner le développement du potentiel écologique et des usages. Plus globalement, il faut inventer un nouveau modèle conjuguant une large information des acteurs (savent-ils tous que les infrastructures vertes peuvent être jusqu’à dix fois moins chères que les grises ?), la diffusion de bonnes pratiques (comme le choix d’essences résistantes pour faciliter l’entretien) et la mise au point de techniques intéressantes pour des investisseurs  (à l’image de ces systèmes qui associent, sur les toitures, végétaux et panneaux photovoltaïques). Sans oublier l’éducation des citadins, essentielle pour qu’ils puissent s’approprier les espaces verts  et les garder en bon état.

Tous impliqués

Sans implication de la population, en effet, impossible de créer des cités vertes durables. Cet impératif explique la multiplication ces dernières années des initiatives privées destinées à faire de chaque citoyen un acteur éclairé et engagé de la végétalisation.  CDC Biodiversité est actuellement en phase d’élaboration d’une application numérique de coaching à la biodiversité en ville dédiée aux habitants. De son côté, Nexity s’est engagé à prendre en charge la maintenance des espaces verts collectifs de sa tour Emblematik à Aubervilliers durant la première année d’exploitation, le temps de former ses occupants avant de leur passer le relai. Quant aux jardiniers et paysagistes, ils réfléchissent à une évolution de leurs métiers vers un rôle de médiation, d’accompagnement et d’animation autour du végétal. Plus que jamais, et en ville particulièrement, la transition écologique est l’affaire de tous.

1 Voir l’étude Les bienfaits du végétal en ville. Etude des travaux scientifiques et méthode d'analyse.