Aménagements paysagers : une nouvelle conception des mobilités

Enquête - Le 01 octobre 2019



Le nouvel aménagement de l’entrée de ville de Mont-de-Marsan (Landes) permet aux cyclistes et automobilistes de circuler en harmonie. © VAL’HOR / Les Victoires du Paysage.

Par leur maîtrise conjuguée des aménagements urbains et de notre écosystème, les professionnels du paysage sont des acteurs clés des nouveaux projets de mobilité. Leur approche globale permet de requalifier les axes de transport, d’accompagner les mobilités douces, de créer de véritables lieux de vie et de favoriser la biodiversité.

Embouteillages, complications pour atteindre les quartiers environnants, zone délaissée par les habitants… L’entrée de ville du Havre (76) et son axe routier cumulaient jusqu’en 2011 les difficultés de nombreuses villes à leur périphérie. « Pour gérer l’afflux d’automobilistes en provenance de Paris, une approche très techniciste était en place avec des mini souterrains sous les carrefours, des autoponts et un échangeur : un système sophistiqué qui s’est avéré finalement très peu résilient », explique Jean-Marc L’Anton, paysagiste concepteur. Mandatée pour requalifier l’entrée de ville du Havre, son agence a été en charge de résoudre les problèmes fonctionnels de l’axe routier tout en apportant un cadre visuel de qualité. Un défi de taille à la mesure des paysagistes, véritables experts des « vides » au sein de la ville, comme les axes de transport, les esplanades, les lieux de passage et de connexion. « Dans le but d’éviter les embouteillages, on a fait la démonstration que tous les échanges pouvaient se faire à plat en ayant recours à des carrefours à feux traditionnels, et non plus sur plusieurs niveaux. En cas de blocage, les automobilistes du carrefour précédent ont ainsi la possibilité de quitter rapidement l’axe », détaille Jean-Marc L’Anton. Pour faciliter la connexion avec les rives et les quartiers environnants, l’agence a également requalifié des contre-allées et conçu une promenade dénivelée. En parallèle, l’ensemble de la zone a été végétalisé. L’entrée de ville est désormais propice aux déplacements de piétons et de cyclistes sur des voies réservées. En redonnant aux axes de transport un cadre de qualité, les aménagements paysagers constituent en effet des leviers forts pour le développement des mobilités douces.


A gauche : Le jury des Victoires du Paysage avec Jean-Marc L’Anton à l’entrée de la ville du Havre (76). © Philippe Demail / VAL’HOR. A droite : Au Havre (76), la connexion avec les rives et les quartiers environnants a été facilitée au niveau de l’entrée de ville. © Agence L’Anton / VAL’HOR

Un levier pour favoriser les mobilités douces

À Mont-de-Marsan (Landes), la voie principale menant au centre-ville a permis de rééquilibrer les usages entre automobilistes d’une part et piétons et cyclistes d’autre part. Ces derniers bénéficient depuis 2011 d’un véritable jardin linéaire aux abords de cet axe, jalonné d’espaces de repos. Les matériaux ainsi que les 6 800 végétaux plantés le long de la promenade confèrent un parfum de ville du Sud à un site auparavant sans âme. Au sein des voies douces, arbres et végétaux permettent de sécuriser les passages.

Situé entre une école, plusieurs commerces et des logements, le carrefour Jean-Moulin (Villeneuve-la-Garenne, Hauts-de-Seine) voyait passer chaque jour de nombreux piétons à proximité des voitures. En 2015, la ville a installé un écran de végétalisation afin d’isoler les habitants du trafic routier et de créer une liaison totalement piétonnière entre les lieux de vie du quartier. La végétalisation de l’endroit, luxuriante, amène un dépaysement total aux riverains et permet de valoriser le quartier.


A gauche : Le nouvel aménagement de l’entrée de ville de Mont-de-Marsan (Landes) permet aux cyclistes et automobilistes de circuler en harmonie. A droite : La promenade pédestre fleurie offre aux habitants plus de 6 800 végétaux dont 110 arbres. ©VAL’HOR / Les Victoires du Paysage.
 

Jouer un rôle au service de l’écosystème de la ville

Intégrer le végétal aux projets de mobilité, c’est leur permettre de jouer un rôle au service de l’écosystème de la ville, qu’il s’agisse de faciliter le traitement des eaux ou de favoriser la biodiversité. Retour à l’entrée de ville du Havre. Ici, les eaux saines issues de la pluie venaient se mélanger à l’eau sale des maisons, provoquant la saturation des stations d’épuration. « À travers l’installation de noues végétales sur les 20 hectares d’espaces publics du projet, toutes les eaux de pluie sont désormais stockées, régulées et filtrées naturellement », explique Jean-Marc L’Anton. Donner une fonction écologique aux infrastructures de mobilité, c’est aussi l’objectif de Loïc Pianfetti, responsable Paysage et Écoconception pour SNCF Réseau. « Pour chaque projet, je m’interroge sur l’utilité que nous pouvons donner au foncier public, et notamment ferroviaire, par-delà son rôle fonctionnel d’origine, d’accueil de l’infrastructure pour ce qui nous concerne ». Entre 2006 et 2009, il accompagne l’aménagement de la ligne à grande vitesse passant par Vaires-sur-Marne (Seine-et- Marne). La demande initiale consistait à créer un bassin d’expansion des crues de la Marne pour protéger la ligne ferroviaire en cas d’inondation et compenser la perte de volume occasionnée par l’infrastructure. Mais c’est un projet paysager plus ambitieux et tout aussi fonctionnel qui a vu le jour pour la SNCF. Une zone humide paysagère de 3 hectares a été créée. Elle comprend une prairie humide, une prairie sèche et une zone relais pour les espèces migratoires en secteur urbanisé. Résultat : depuis 2009, faucons crécerelles, renards, tritons palmés, mantes religieuses ou encore libellules ont réapparu sur le site, à proximité de la ligne de chemin de fer. Une illustration de plus de la capacité des aménagements paysagers à conjuguer infrastructure de mobilité et respect de l’écosystème.

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